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Destination Chukotka

L'ITINéRAIRE

La route 110

La piste
de ViliuIsk

La Route des os
Vers Magadan

La traversée du Chukotka

L'itinéraire

L’itinéraire mène jusqu’au bout des pistes. Au final, tout n’aura pas pu être exploré. La saison est courte, il aura fallu des choix.

La Moto

Pour cette expédition, j’ao naturellement décidé de repartir avec la KTM 450 Rally Factory Replica, testée avec succès sur les pistes et dans les gués d’Islande.

L’avantage de cette moto par rapport à une machine d’enduro aventurisée, c’est qu’elle est conçue d’usine pour des conditions extrêmes. Avec 3 réservoirs et 36l de capacité de carburant, des suspensions très haut de gamme, un moteur ultra-costaud avec son piston Pankl, un radiateur d’huile, une tour, un excellent éclairage, un réservoir d’eau de 3l dans le sabot et une facilité d’accès à la mécanique déconcertante, il n’y a pas grand chose à modifier pour un raid extrême. Guère qu’à lui jeter une paire de sacoches en travers de la selle.

Cette fois encore, la moto a été préparée et peaufinée par Nomade Racing, la meilleur garantie que je n’aurai aucun souci mécanique sur la route.

C’est un privilège de faire partie de la famille Nomade Racing et de profiter de l’expérience d’une telle équipe.

Manu me distille ses derniers conseils. Le plus important de tous: que faire si je tombe dans l’eau lors d’un passage de gué?

Le réservoir d’eau de la RFR est prévu par mesure de sécurité en rally. En Sibérie, je ne manquerai pas d’eau. J’utilise cette réserve pour stocker 3l d’huile haute performance, de quoi faire 2 vidanges au milieu de nulle part.

Départ de la RFR pour Stuttgart, d’où elle sera expédiée à Oulan Bator.

Rares sont ceux qui ont tenté la route 110 en moto. Encore moins au mois de juin, et pour cause. Cette route n’en est pas vraiment une. Après avoir remonté le Baïkal par son côté ouest deux fois lors de mes expéditions précédentes, je me lance cette fois dans l’exploration par l’est.

La route 110

Une piste impeccable s’enfonce dans la Taïga en direction d’Ust-Barguzin.

A Umhei surgit la première difficulté, un gué absolument infranchissable. J’apprends qu’aucun véhicule, ni 4×4 ni camion n’a encore emprunté la route cette année. Avec la fonte des neiges, la rivière Barguzin emporterait quinconque tenterait de la traverser.

De longs jour d’attente commencent à Umhei dans l’espoir que le niveau de la rivière descende. Un site avec quelques bungalows construits autour de sources chaudes aux vertus réputées sacrées me sert de gite. Pour y accéder il faut traverser un pont suspendu. Me voyant chargé, on m’a prêté une brouette pour transporter mes affaires.

Peu d’autre occupation à Umhei que celle de photographier les décorations insolites du site.

Sergei, le chauffeur d’un camion 6×6 Ural de type militaire va ouvrir la route. A son bord, une poignée de travailleurs de la taïga et des forces spéciales russes, les VDV. Ils acceptent gentiment de m’aider. La RFR est chargée dans le camion pour traverser le premier gué.

De l’autre côté de la Barguzin, commence la route 110.

Les gués se succèdent, tous trop profonds pour pouvoir y passer en moto. On ne traverse sans commencer par partager un coup de vodka perché en haut de la benne du camion.

A l’intérieur du camion, l’ambiance est feutrée. Isolation pour l’hiver, couchettes et toit ouvrant, l’Ural se révèle aussi confortable que peut l’être un camion militaire.

J’établis mon camp auprès de mes compagnons de voyage. Sur les monts environnants, la neige est encore bien présente.

Sergei me dit que la route est impraticable en moto, mieux vaut faire la route avec le camion. Même avec ses 6 roues motrices, l’Ural doit progresser avec prudence.

Ouvrir la route au printemps, c’est faire face à de nombreux obstacles, ici un rocher éboulé qui barre le chemin. Il faut le dégager.

Un torrent de boue a dévalé quelques jours plus tôt. Et ce qui était tant redouté arrive. L’Ural est enlisé et les premières tentatives pour l’extraire du piège sont un échec. Un rocher proéminent se dresse entre les 2 essieux. Le problème, c’est que personne ne peut venir nous chercher. On envisage de m’envoyer chercher de l’aide avec la RFR mais qui sait si la route est possible?

Le lendemain, on se met sérieusement au travail. Les forces spéciales ne sont pas spéciales pour rien…

Comment sortir un camion chargé d’un enlisement avec une tronçonneuse, beaucoup de bras musclés et un cric minuscule… Il n’y a qu’en Russie qu’on peut voir ça!

Un « pont » a été construit sur la boue à l’avant du camion. Et à force de le lever centimètre par centimètre, on a a fini par le lever suffisamment pour espérer nous en sortir.

Les traces de loups et d’ours ne sont pas rares dans cette réserve naturelle. Pas très rassurant quand on dort sous la tente.

Les épreuves se succèdent. La rivière a débordé. Un peu plus loin, il y a un mètre d’eau.

Une bonne épaisseur de glace recouvre encore certaines sections.

Une durite d’huile a lâché. Imperturbable, Sergei s’affaire à réparer en pleine taïga.

La PISTE de VILIUISK

La route 110 rejoint la BAM. Plutôt que de me lancer dans cette épreuve hasardeuse à laquelle j’ai eu la chance de survivre une fois sans me faire mal il y a 6 ans, je décide la remonter vers l’ouest (sa partie entretenue) sur 700km jusqu’à Ust-Kut.

Quatre jours de barge sur la Léna vont me mener jusqu’à Lensk, plus au nord. C’est la deuxième fois que je prends cette barge, la fois précédente était il y a 4 ans.

Le pont étant particulièrement boueux, le capitaine m’a autorisé à poser ma tente sur un balcon au première étage, l’endroit parfait pour se laisser bercer par la lente dérive de l’embarcation.

Je suis arrivé au port au moment ou se terminait le chargement. Sachant qu’il faut en général attendre plusieurs jours, j’ai sauté sur l’occasion et suis monté à bord. Seul problème, je n’ai pas eu le temps d’acheter à manger ni à boire pour les quatre jours du trajet. Mais en Sibérie, on ne laisse pas un homme avoir faim: la cuisinière du capitaine m’apporte plusieurs fois par jour ce qu’elle a gentiment mis de côté pour moi.

J’ai la chance de voir des paysages que j’ai raté la dernière fois du fait d’y avoir navigué de nuit.

A Peledui, le déchargement tourne à la catastrophe.

Nous arrivons à Lensk au milieu de la nuit. Plutôt que de m’y arrêter, je décide de pousser jusqu’à Mirny. Stan, avec qui j’ai sympathisé sur la barge fera la route derrière moi. La route est extrêmement glissante, mais avec les pneus d’enduro, la RFR dévore la piste comme s’il s’agissait d’un beau macadam. A deux heures du matin, autant au nord au mois de juin, il fait à peine nuit.

A Mirny, je retrouve Ilya et mes amis du club de bikers rencontrés en 2015. Dans sa datcha, Marat se prépare à un voyage en Mongolie avec sa 990 Adventure R.

La mine de diamant à ciel ouvert de Mirny, avec son cratère géant, fait plus d’un demi-kilomètre de profondeur.

La piste de Viliuisk s’étend sur plus de 1000km entre Mirny et Yakutsk.

Les traversées sur de petites barges qui servent de ferries sont la particularité de cette piste.

A Viliuisk, pour la grande fête du Ысыах (Issah), je suis l’invité du maire, Monsieur Sergei Nikolaevitch, en tant qu’auteur.

Après Yakutsk commence la M56, encore appelée « route des os » à cause des goulags ou route de la Kolyma. Plus de 2000km séparent Yakutsk de Magadan.

La route des OS

Non loin de Yakutsk, les mousses émergent tout juste d’un long hiver.

La route serpente dans les monts Kolyma.

Plein à une pompe le long de la route des os en sans plomb 92. Même avec des carburants de moins bonne qualité, la RFR tourne comme une horloge.

Sur la route, je retrouve mon ami, l’artisan Maitre Fedor, qui a son tour me fait faire la connaissance d’autres maitres yakoutes.

C’est en forgeant que l’on devient forgeron!

L’été est doux sur la rivière Amga. Il faut en profiter, l’hiver, les températures atteignent -50°C.

Après avoir laissé la Yakoutie derrière soi, le long de la route des os, on peut voir nombre de villes fantômes, reliquats de l’ère soviétique.

La journée a été éprouvante: 1200km de piste en 24 heures avec une batterie morte, une fuite au joints spi et de l’huile qui a coulé sur mon frein avant. Epuisé, j’ai planté ma tente sur le bord de la route à 300km de Magadan.

Le Masque de l’Affliction, un monument en souvenir de ceux qui ont souffert dans les goulags de la Kolyma, me prouve que je ne rêve pas, je suis bien arrivé à Magadan.

6 ans après ma précédente tentative, me voici enfin à Magadan!

La mer d’Okhotsk, au bout du monde. Les phoques se prélassent dans les vagues. 

A Magadan, je rencontre Egor, moniteur de ski, enduriste, surfeur. Il m’invite à un partie de pêche au saumon.

L’araignée de mer géante du Kamchatka est un délice.

La rivière grouille de garbusha, des saumons qui remontent de la mer d’Okhostk.

A Magadan, je suis invité par Vladimir (Volodia) et sa famille à aller voir une compétition d’enduro.

Après des jours d’attente à Magadan, puis à Omsukchan, le niveau du fleuve Kolyma s’avère trop bas pour que les barges y naviguent. De retour à Magadan, j’expédie la moto et je rejoins Pevek, au nord de la Yakoutie en avion.

La traversée du Chukotka

Tcherski, tout au nord de la Yakoutie se situe sur l’embouchure du fleuve Kolyma tout près de l’océan glacial arctique.

Une ancienne antenne sert désormais de station d’accueil pour des scientifiques venus du monde entier intéressés au permafrost.

Avec le réchauffement climatique et la fonte du permafrost, des bâtiments de Tcherski construits sur la glace s’effondrent.

A Tcherski, le parc du Pléistocène est une expérience scientifique pour diminuer l’impact des gaz à effet de serre. Cette zone immense a été peuplée de grands herbivores pour combattre le réchauffement climatique. Le rêve de la famille Zimov qui a créé et entretien le parc: voir  y brouter des mammouths.

A quelques dizaines de centimètres sous terre commence le permafrost. Ici, une galerie a été creusée pour l’explorer.

J’ai loué les services d’un petit bateau pour descendre les méandres de la rivière Anuysk jusqu’au village homonyme.

La piste entre Anyusk et Bilibino est étonnant bonne. Nous tombons nez-à-nez avec trois jeunes ours qui détalent à notre passage.

A Bilibino, je recontre Evgeni qui prépare lui aussi une KTM, une 525 EXC.

Nous retrouvons des amis d’Evgeni pour quelques jours dans la nature. Pêche et détente au programme.

Les murs de la cabane sont ornées de marques d’attaques d’ours réputés encore plus gros que les kodiaks d’Amérique du nord. Peu rassurant quand on dort sous la tente.

Trois jours dans la nature à descendre la rivière Mali Aniuy sont prévus.

Campement de rêve au bord de la rivière après une magnifique journée d’exploration du Grand Nord russe.

Au menu, ousha, une soupe de poisson faite avec les ombres capturés dans la journée.

Pour le dessert, il suffit de se baisser – tout en surveillant qu’un ours ne surgisse pas de derrière un taillis.

Evgeni m’a mis en contact avec Serguei, un chauffeur de camion qui s’apprête à faire la traversée du Chukotka pour aller chercher des containers à Egvekinot, de l’autre côté de la péninsule. Plus de 2000km se déroulent devant nous, sur une route étirée sur le permafrost. A quelques dizaines de centimètres sous la terre, il n’y a plus que la glace. Pour cette raison, aucun arbre de peut pousser dans la toundra.

Nous campons au bord des rivières où les saumons remontent de l’océan Glacial arctique par milliers.
Les gués sont particulièrement profonds, même les camions 6×6 s’y enlisent régulièrement.

Nous campons au bord des rivières où les saumons remontent de l’océan Glacial arctique par milliers.
Les gués sont particulièrement profonds, même les camions 6×6 s’y enlisent régulièrement.

Pour les chauffeurs, la traversée du Chukotka c’est aussi l’occasion de profiter de l’été très court et de faire le plein de saumon. Les saumons préparés, salés et mis dans des fûts. Ils seront dégustés tout le reste de l’année. Le caviar est lui aussi préparé.
Je dois moi aussi préparer le poisson – un façon de payer mon voyage.

Les camions roulent à très faible allure dans les paysages désolé du Grand Nord.

Nombreux, les gués seraient impossibles à traverser en moto.

En plein mois d’août, la neige fait déjà sont apparition. Il fait un froid glacial.

Les camions traversent lentement la toundra.

Au bout de 6 longs jours de route, nous arrivons à Egvekinot, une petite bourgade jadis tchoutkche à la rencontre de la mer de Béring et de la mer des tchoutkches.

Plusieurs jours d’attente à Egvekinot me sont imposés avant de trouver un vol vers Anadyr. L’Alaska est tout près.